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La crise de relève des équipages pourrait bien se transformer en une épidémie de travail forcé, alors que la Journée mondiale de la mer marque tristement le sixième mois de cette tragédie

Actualités Communiqué de presse 28 Sep 2020

La Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) a dénoncé l’inaction des gouvernements dans le contexte de la crise de relève des équipages, déclarant que les restrictions de voyage et fermetures actuelles des frontières liées au Covid-19 risquent de donner lieu à une épidémie de travail forcé et d’esclavage moderne, les gens de mer étant de plus en plus contraints de rester à bord pour travailler contre leur volonté.

Selon le Secrétaire général de l’ITF, Stephen Cotton, 1,65 million de gens de mer ont été littéralement abandonnés par les gouvernements à travers le monde, favorisant ainsi l’aggravation de cette crise de relève des équipages qui entame son sixième mois aujourd’hui – le 24 septembre 2020, coïncidant tristement avec la Journée mondiale de la mer.

On estime que 400 000 marins seraient à présent piégés à bord des navires, et un même nombre serait actuellement sans emploi, à terre, dans l’impossibilité de venir relever leurs collègues.

Cotton a déclaré : « Il est absolument honteux d’avoir laissé cette crise perdurer depuis six mois, sans qu’une issue soit en vue. En refusant d’accorder aux gens de mer des exemptions pragmatiques en tant que travailleurs-clés, leur permettant d’embarquer et de débarquer des navires, les gouvernements les relèguent au rang d’esclaves à bord de ce que beaucoup appellent leurs ‘prisons flottantes’ ».

Stephen Cotton a déclaré que l’ITF travaillait aux côtés de grandes sociétés profondément préoccupées par les risques induits pour leur chaîne d’approvisionnement si les gens de mer demeurent bloqués à bord, dans l’impossibilité d’être relevés par un nouvel équipage.

« Nous avons publié cette semaine un important rapport d’experts qui montre que la crise de relève des équipages fait peser trop de risques sur l’industrie mondiale du transport maritime. D’autres accidents se produiront si nous ne parvenons pas à faire débarquer ces travailleurs poussés à bout de force – nous assisterons à de nouveaux déversements d’hydrocarbures sur nos côtes et à de nouveaux décès en mer. »

« Je salue les dirigeants d’Unilever et d’autres grandes sociétés qui assument leur responsabilité à l’égard de la santé et du bien-être des gens de mer dans leurs chaînes d’approvisionnement et qui ont appelé les gouvernements à se réveiller face à cette crise qui ne cesse de s’intensifier. »

« La situation est à la limite du travail forcé ou équivaut même d’ailleurs à du travail forcé, et toutes les entreprises ont la responsabilité d’user de leur influence pour exiger une intervention urgente des gouvernements afin de mettre un terme à cette crise tout en s’assurant que leurs chaînes d’approvisionnement ne subissent pas de répercussions négatives eu égard aux droits de l’homme des marins. »

David Heindel, président de la Section des gens de mer de l’ITF, a déclaré que les esprits commençaient à s’échauffer, et à juste titre, au sein de la main-d’œuvre maritime mondiale.

« Nous célébrons aujourd’hui la Journée mondiale de la mer – une journée où nous devrions célébrer la contribution de nos industries et nous faire humblement l’écho de toute la gratitude des populations qui ont vu les gens de mer, les dockers, les pêcheurs et d’autres dans nos secteurs d’activité intensifier leurs efforts afin de pouvoir faire la différence durant cette pandémie, » a déclaré Heindel. « Au lieu de cela, la Journée mondiale de la mer 2020 est marquée par l’intensification de cette crise humanitaire, économique, environnementale et des droits de l’homme. »

« Pour saluer la contribution des gens de mer à leur économie, et pour contribuer véritablement à la pérennité du transport maritime, les gouvernements doivent se mettre au travail, comme nous le faisons tous les jours en mer, et faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que ces gens de mer épuisés puissent rentrer chez eux, relevés par un nouvel équipage, et s’assurer que ces héros soient traités avec la dignité et le respect qui leur reviennent. »

« Les gens de mer sont épuisés, à bout de force, de plus en plus désillusionnés et regrettant le choix qu’ils ont fait de travailler en mer – et ils craignent qu’on leur fasse payer les accidents inévitables qui surviennent lorsque l’on pousse des travailleurs au-delà de leurs limites physiques et mentales. »

« On compte aujourd’hui bien plus de 400 000 gens de mer continuant de travailler alors que leur contrat initial a pris fin. Ils sont de plus en plus nombreux à voguer sur les mers depuis plus d’un an. Nous refusons que cela devienne la nouvelle norme. Tout être humain a le droit de refuser un contrat, de cesser de travailler et de rentrer chez lui – et nous allons nous associer aux entreprises responsables, à nos affiliés et aux gens de mer eux-mêmes pour que ces droits soient respectés, » a conclu Heindel.

Notes :

  1. Le nombre de gens de mer dans le monde est tiré des estimations de la Chambre internationale de la marine marchande.
  2. Lire et télécharger le rapport du Comité de la sécurité maritime de l’ITF Beyond the Limit: How Covid-19 corner-cutting places too much risk in the international shipping system (Au-delà des limites : pourquoi sacrifier la sécurité au motif du Covid-19 fait courir trop de risques au système international du transport maritime).
  3. Les dernières estimations en date, faisant état de 400 000 marins à travers le monde, pris au piège dans des navires où ils continuent de travailler alors que leurs contrats ont pris fin, émanent du Groupe de négociation mixte réunissant les employeurs maritimes internationaux, sur la base d’une extrapolation des données concernant leurs flottes par rapport à la flotte mondiale.

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